Justice =
1) Rendre justice :
c'est là le rôle de l'appareil judiciaire. Celui-ci doit
punir un acte qui contrevient à la loi. On punit le contrevenant
pour faire respecter la règle, pour protéger ceux qui la respectent
en éloignant ceux qui ne la respectent pas, et, dans le meilleur des
cas, pour faire réfléchir le coupable.
Dans la sphère
judiciaire, la justice consiste d'abord en l'égalité de
traitement de tous les justiciables.
Injustice = Privilèges
Il s'agit également
d'attribuer une sanction proportionnée à celui qui a été
jugé coupable.
Injustice = Un jour de
prison, en moins, ou en trop
La proportion se trouve
ici en étant équitable, c'est-à-dire en traitant tout le
monde sur le même pied d'égalité, mais tout en prenant en compte
les situations particulières de l'affaire jugée (exemple :
circonstances atténuantes).
A l'inverse, la justice
peut ne pas consister en un ensemble de sanctions, en un appareil
répressif, mais, au contraire, en le fait de récompenser
ceux qui font le bien, de reconnaître le mérite de certains qui se
distinguent.
2) Etre juste :
adopter un comportement noble, droit, bon, en excluant la
violence de sa vie.
Exemple : Les
Justes lors de la seconde guerre mondiale.
Ainsi, on peut être
juste sans nécessairement obéir à l'appareil judiciaire de son
pays qui, parfois, peut être injuste.
Le juste, le noble, le
moralement bon, exclut la violence de son existence :
Exemple :
Jean-Paul II pardonnant, à Noël 1983, à Mehmet Ali Agça qui lui
avait tiré dessus le 13 mai 1981 sur la place Saint-Pierre de Rome.
Cependant, il y a là
sans doute une démarche politique au service du message de l'Eglise
catholique.
Autre exemple :
Samereh Alinejad,
mère
iranienne, pardonne, le 15 avril 2014, au meurtrier de son fils en
transformant la peine de mort en une gifle.
« Le meurtrier pleurait. Il a demandé pardon. Je l'ai giflé, ce qui m'a calmé. J'ai dit : « Je te punis pour le malheur que tu as fait. » Les gens ont applaudi, certains pleuraient. »
Samereh Alinejad
La
corde ou la gifle ? Où est la justice ? Où est la
noblesse ?
« Tout père
frappe à côté. »
La Fontaine (1621 –
1695), Fables,
1668, VIII, XX : « Jupiter et les Tonnerres », Vers
41
Peut-être
aurait-il fallu dire « Toute mère ».
= La loi du pardon
dépasse la loi du Talion.
A
l’occasion de la lecture suivie du Criton
de Platon, nous verrons comment le juste peut encore l’être alors
qu’il n’est pas ici victime, mais accusé (injustement). Faut-il
accepter une décision judiciaire injuste ? Faut-il protester
contre l’appareil judiciaire qui nous condamne injustement ?
Le
Criton
est le second volet d’un œuvre en trois parties de Platon :
l’action suit celle de l’Apologie
de Socrate,
et précède celle du Phédon.
-
L'Apologie
de Socrate :
Dans
l’Apologie
de Socrate
est relaté le procès qui condamne Socrate à boire la cigüe :
En
-399, Mélétos se rend au Portique royal pour y intenter une action
auprès de l’archonte-roi. Socrate est soumis à trois
chefs d’accusation lors d’un procès public durant lequel il
devra se défendre devant ses juges et toute la Cité athénienne :
1)
Corruption
de la jeunesse.
Socrate
s’entretenait régulièrement avec de jeunes garçons qui étaient
ses disciples : ils apprenaient l’usage de la raison.
2)
Non-reconnaissance
de l’existence des dieux traditionnels athéniens.
Le
philosophe est toujours libre à l’égard de la tradition.
3)
Introduction
de nouvelles divinités dans la Cité.
Les
Idées sont les seules réalités véritables. La
raison (logos)
est la seule digne d'admiration.
Dans
un premier temps, Socrate se défend d’être coupable de ces trois
chefs d’accusation :
1)
L’éducation
n’est pas corruption.
2)
Il a
toujours été respectueux de la tradition.
Cependant,
dans un second temps, il considère comme acquis qu’il sera de
toute manière condamné (injustement alors) : il plaide alors
pour obtenir une peine juste en fonction de ce qu’on lui reproche.
Là se trouve son ultime provocation à l’égard de la Cité
lorsqu’il demande, non sanction, mais récompense : il
propose, comme peine alternative, comme le veut l’ordre du procès,
d’être nourri à vie dans le prytanée, la plus haute des
récompenses. En effet, selon lui-même, Socrate a été un
bienfaiteur pour la Cité (en développant l’exercice de la
raison).
Pourtant,
il savait très bien qu’une telle attitude (un condamné qui
demande récompense) serait jugée comme étant provocatrice,
l’amenant par conséquent à la mort. Socrate s’est donc
peut-être fait volontairement martyr en vue de poursuivre ses leçons
par son exemple, plutôt que seulement par ses discours.
-
Criton :
Cependant,
la condamnation à mort ne prend pas effet tout de suite car, selon
la loi athénienne, le peuple ne doit pas se souiller d’une
exécution tant que le bateau sacré n’est pas revenu de l’île
de Délos.
Ainsi,
l’action du Criton
peut avoir lieu. Criton, un ami de Socrate, vient le voir dans sa
prison, et lui propose de s’évader pour se soustraire à son
injuste condamnation. S’en suit un dialogue socratique pour
expliquer à Criton pourquoi Socrate doit accepter de subir
l’injustice qu’on lui soumet (ce que Criton n’acceptera pas).
Socrate est alors devenu comme le martyr de la philosophie.
-
Phédon :
Le
Phédon,
lui, est un dialogue qui revient sur le moment de la mort même de
Socrate.
- Jacques Louis David (1748 - 1825), La mort de Socrate, 1787 :



Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire