mardi 9 juin 2015

Du vivant

Résumé : Du vivant.

La première question qui se pose lorsque l'on cherche à étudier l'être vivant est naturellement : de quel être vivant parle-t-on ? Nous intéressons-nous aux animaux, aux hommes seulement, ou aux plantes ?

Cette distinction de l'être vivant en trois catégories (végétale, animale, humaine) est une première tentative de classification des êtres vivants, tentative que l'on peut attribuer à Aristote. En effet, selon ce dernier, les trois catégories du vivant se traduisent, dans l'observation des faits, par trois types d'âme. Par « âme », il ne faut pas ici entendre l'âme immatérielle pensée par Descartes qui serait proche de l'âme pensée par les religions. En ce sens spirituel, les animaux et les plantes n'ont pas d'âme : Descartes n'est pas animiste. Cependant, il y a bien une âme propre aux plantes, une propre aux animaux, et une propre aux hommes : le végétal possède une âme végétative ; les animaux une âme motrice ; et les hommes une âme raisonnable. Par « âme », il faut ici entendre ce que signifie le grec anima, c'est-à-dire ce qui anime, le principe du mouvement au sein du vivant.
Cette conception de l'âme comme étant ce qui anime, comme souffle de vie, est également présente dans la Bible :

« Dieu modela l’homme dans la glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant. »
Genèse, 2, 7

Chez Aristote :

  • l'âme végétative est ce qui permet la croissance des plantes par la nutrition.
  • l'âme motrice et sensitive des animaux comprend l'âme végétative des plantes en y ajoutant la capacité à se mouvoir par soi-même ainsi que la sensation (âme végétative + mouvement spontané et sensation)
  • l'âme humaine comprend l'âme motrice et sensitive des animaux (qui, elle, comprend l'âme végétative des plantes) en y ajoutant le logos, c'est-à-dire la parole qui peut être produite par la raison (âme motrice + logos).



Cependant, historiquement, c'est la conception cartésienne de l'âme, et, par conséquent, du vivant, qui a été retenue. Descartes pense une distinction radicale entre la substance immatérielle (âme strictement humaine proche de l'âme pensée par les religions) et la substance matérielle, corporelle.

Pour Descartes, le corps n'est qu'une portion d'étendue, c'est-à-dire d'espace, portion alors mesurable, quantifiable (contrairement à l'âme qui relève de l'immatérialité : l'âme est non-étendue, non-spatiale, donc, non-mesurable, inquantifiable). La substance matérielle, corporelle, mesurable, quantifiable, noie les catégories du vivant dans l'étendue, dans l'espace. En effet, d'un point de vue physique, on peut étudier le végétal, l'animal, et le corps humain sous le même aspect : celui du corps étendu mesurable. De la même manière, on peut étudier les corps inertes (minéraux), ou les corps des machines animés par les hommes uniquement du point de vue physique, uniquement sous leur aspect étendu, comme on le fait pour le reste des corps (végétaux, animaux, et humains). De même, on peut étudier les corps morts de la même façon que nous le faisons pour les corps vivants, quels qu'ils soient. Ainsi, en étudiant les corps, les substances matérielles, uniquement sous leur aspect étendu, le cartésianisme, ou, tout du moins, la physique cartésienne, fait perdre la spécificité du corps vivant, les corps vivants étant étudiés de la même manière que les corps morts. Selon la physique cartésienne qui n'analyse que l'étendue occupée par les corps, rien ne distingue le corps vivant du corps mort.

Le fait que le corps machinal puisse être étudié de la même manière que le corps organique relève de ce qu'on appelle le mécanisme cartésien.

En de nombreux endroits du corpus cartésien (qui, ici, comprend également les penseurs cartésiens successeurs de Descartes), le corps organique est comparé à une machine :

« Quand l’horloge indique l’heure, c’est la même manière que le pommier qui donne des pommes. »
Descartes, Principes de la philosophie, 1664

« Lorsque les hirondelles viennent au printemps, elles agissent en cela comme des horloges. »
Ibid., Lettre au Marquis de Newcastle, 1646

« jugeons que le corps d'un homme vivant diffère autant de celui d'un homme mort que fait une montre, ou autre automate (c'est-à-dire autre machine qui se meut de soi-même), lorsqu'elle est montée et qu'elle a en soi le principe corporel des mouvements pour lesquels elle est instituée avec tout ce qui est requis pour son action, et la même montre, ou autre machine, lorsqu'elle est rompue et que le principe de son mouvement cesse d'agir. »
Ibid., Traité des passions, Article 6 : « Quelle différence il y a entre un corps vivant et un corps mort. »




Cependant, ce qu'on peut reprocher au cartésianisme, à la physique cartésienne, c'est qu'en étudiant les corps, qu'ils soient organiques ou mécaniques, en mouvement ou inertes, vivants ou morts, uniquement sous leur aspect étendu, l'homme perd ce qui faisait la spécificité du vivant qu'avait au moins le mérite de penser Aristote.




Pourtant, si nous nous attachons à chercher ce qui est spécifique au vivant, nous pouvons noter que c'est la capacité d'adaptation qui le caractérise. En effet, c'est cette capacité qui explique la « sélection naturelle » par espèces pensée par Darwin [1809 - 1882 ; Angleterre]. Ici, l'espèce qui survivra est celle qui saura s'adapter le mieux à ses conditions d'existence. C'est cette adaptation qui explique l'évolution des espèces, c'est-à-dire notre origine du point de vue scientifique. L'adaptation des espèces peut prendre des formes directement visibles par l'observateur. Si l'on prend l'exemple de la girafe, il apparaît que cette espèce s'est adaptée pour aller chercher sa nourriture (indispensable à sa survie) en hauteur, ce qui explique que, dans l'évolution des espèces, son cou s'est allongé.
Ainsi, l'adaptation permet l'évolution, la transformation. Ici, les espèces qui ne s'adaptent pas (par manque de temps ?) disparaissent.






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